Eglise Notre Dame du Rosaire (Wierde)

A Wierde, comme dans la plupart de nos villages, une église rassemble les chrétiens depuis de nombreuses générations. A Wierde, nous avons la chance de posséder une église qui est le témoin d’une riche tradition humaine et religieuse. On comprend la fierté de ses habitants quand ils parlent de leur église, et aussi leur joie à vous y accueillir.
Wierde se situe à 7 km de Namur, dans cet axe Rhin-Meuse, dont l’importance culturelle, religieuse et artistique ainsi que l’ouverture aux divers courants de la civilisation dès le moyen-âge n’est plus à démontrer. L’église de Wierde nous rappelle ce passé qui nous imprègne tous aujourd’hui.
L’histoire du village remonte à l’époque Gallo-Romaine où la réputation des poteries qui y étaient produites dépassait largement nos frontières. L’histoire de Wierde est liée à celle des seigneurs qui y ont vécu. Au 12e siècle, les « Wierde » (comme les « Mozet », les « Dave », les « Erpent »…) occupaient un territoire sis aux confins de la principauté de Liège et du comté de Namur. Ce lignage noble, s’est éteint fin du 13e siècle. L’église du village qui était jusqu’alors leur propriété, est dès lors passée à l’abbaye de Géronsart, fondée à Jambes (Namur) quelques décennies plus tôt. Depuis le 19e siècle, elle appartient à la commune de Wierde qui a été absorbée par la ville de Namur lors de la fusion des communes en 1977.
Historiens, archéologues, amateurs d’art et de belles choses portent un grand intérêt à l’église romane de Wierde. Elle date du 12e siècle. Elle procédait sans doute d’une bâtisse à une seule nef -probablement en bois – laquelle était flanquée de la tour que nous connaissons toujours. Peu d’archives nous parlent du passé de cette tour et de l’église. La plupart sont, hélas, perdues ou brûlées.
La tour de l’église fut selon toute vraisemblance, le donjon des seigneurs du lieu dont le château était sis tout à côté; une tour de défense qui leur servait de refuge ainsi qu’à la population en cas de troubles. Fort logiquement ils y avaient accolé l’église seigneuriale primitive. Cette tour à trois niveaux remonte apparemment au 11e siècle. Haute de 20 m, elle forme un carré de 9,5 m de côté avec des murs épais de 1,70 à 2 m. Elle faisait partie d’un ensemble de trois tours défensives : les deux autres étant la tour du château d’Andoy et l’autre la tour du Mont Sainte-Marie, hameau situé un peu plus à l’est de Wierde.
Son seul accès se faisait du côté versant sud (côté du cimetière) par une porte située à une certaine hauteur, qui de ce fait n’était accessible que par une échelle. Une fois retirée, l’accès de la tour devenait impossible. Cet accès –encore visible au-dessus de l’entrée actuelle de la tour– a été muré et transformé en archère au Moyen Âge. Plusieurs meurtrières et des archères restent ouvertes, d’autres ont été fermées. Des indices d’une vie et d’une utilisation de la tour à des fins stratégiques amènent les historiens à parler d’une architecture militaire.
Le sommet de la tour devait initialement avoir une superstructure en charpente qui a pu servir de hourd à la manière d’un authentique château-fort d’où l’on pouvait jeter divers projectiles sur les assaillants.
En 1716 la tour et sa flèche furent restaurées. Trois nouvelles cloches furent installées au troisième niveau de la tour, coiffée d’une flèche octogonale en ardoise à trois niveaux.
Son rez-de-chaussée était totalement clos et n’avait qu’une petite fenêtre ronde, sous l’accès de l’étage. On appelait cette salle basse et sombre la « cave ». Au début du 18e siècle elle fut aménagée en école. Dans ce but on perça une porte et une fenêtre. Probablement de cette même époque datent l’âtre et la hotte, que l’on voit toujours.
On y trouve aujourd’hui un grand Christ en bois polychrome orné du Symbole des quatre Evangélistes, ainsi qu’une « Sedes Sapientiae » image romane en terre cuite peinte de J.Willame. La fenêtre a reçu un vitrail lyrique et lumineux dû à l’artiste L.M.Londot.
Le mur du cimetière actuel est établi en terrasse et devait se prolonger pour ceinturer l’église et la tour comme un premier contrefort de défense, à l’intérieur duquel était parqué le bétail en cas de conflit.
L’église actuelle construite aux frais du seigneur local et des villageois, date de la première moitié du 12e siècle. Elle est composée de deux architectures d’inspiration différente, issues de deux nécessités successives, l’une défensive, l’autre religieuse. Elle est quasi contemporaine de sa sœur jumelle de Waha (1050) présentant les mêmes caractéristiques d’église romane primitive : sobre et simple.
Jusqu’en 1706 où un incendie emporta la toiture et le plafond, l’église n’a pratiquement pas changé. C’était trop onéreux et il fallait de plus, s’entendre entre propriétaire et habitants de Wierde pour décider qui paierait les transformations ! De ce fait, l’église est restée un témoin particulièrement privilégié de l’architecture romane mosane. Fort heureusement, elle n’a subi depuis lors que des modifications secondaires. Les plus importantes en 1837 furent aussi les plus malheureuses. Mû par un malencontreux besoin d’adaptation au goût de l’époque, on supprima de chaque côté un pilier sur deux. Elle est classée depuis 1939.
Une remarquable restauration en 1975 a rendu à l’intérieur de l’église le caractère et le style que l’extérieur avait heureusement conservé. L’administration communale avait confié la mission de cette délicate restauration à l’architecte Roger Bastin. Celui-ci y mit toute sa compétence et son enthousiasme, ainsi qu’il l’avait déjà fait de maitresse façon à Waha, à Wéris ainsi qu’à Tohogne. C’est cette église que nous vous proposons de visiter.
Au centre du chœur se dresse aujourd’hui l’autel d’une sobre simplicité, composé de deux blocs en petit granit du sculpteur J.Willame. Une fenêtre aveugle, curieusement de style gothique, retrouvée lors de la restauration, à droite dans le chœur, était une « piscine liturgique » équipement lié au moyen-âge au rituel de la purification des mains du prêtre.
Il était essentiel que ce chœur ne soit pas trop éclairé au détriment de la nef. L’ouverture de la fenêtre centrale –mur initialement aveugle– lors de la restauration de 1976 a fait difficulté sur ce point. Il fut alors demandé à l’artiste J.M Londot de créer pour le chœur des vitraux à la fois hauts en couleur mais très denses.
La grande nef fit l’objet de la sollicitude particulière des architectes. Elle avait été incendiée en 1706 et, après plusieurs années de tergiversations, couverte en 1712 d’un plafond plat, soutenu par 5 poutres enduites. Ce plafond fut remis à neuf en 1759, puis, ainsi qu’on le voit noté au-dessus de l’orgue en 1763.
En rétablissant les piliers manquants lors de la restauration, on ne fit pas seulement œuvre archéologique mais, d’abord et surtout, on a rendu à cette belle nef son espace, son volume clair, grave et cohérent.
Cette nef centrale est séparée des collatéraux par de puissants piliers carrés. La transition avec le chœur est assurée par un grand arc triomphal.
Sur le premier pilier à droite est encastrée une pierre tombale datée de 1627 que nous vous laissons le soin de déchiffrer. Curieusement on omit d’y graver la date du décès de l’épouse du défunt. Une autre pierre tombale adribuée à la famille « de Maillen », n’est plus guère déchiffrable et se trouve à gauche dans le chœur en face de la porte de la sacristie. Pas d’autre pierre tombale dans le pavement; probablement les habitants de l’époque n’en avaient-ils pas les moyens. Seule une modeste pierre commémorative datée de 1739 est encastrée dans le pavement près des fonts baptismaux et nous rappelle le nom du curé de l’époque, Philippe Pierar.
Trois autres fragments de pierres tombales aux inscriptions en écriture gothique remontant au haut moyen âge se retrouvent sous forme de pierres de récupération, l’une à l’extérieur sur un appui de fenêtre de la sacristie, l’autre au pied de l’autel de Notre-Dame, qui est adossé au mur de la sacristie… quant à la dernière, bien malin qui la trouvera… dans la chapelle de la tour.
Outre les jolis confessionnaux installés dans les bas-côtés, on peut admirer quatre statues en bois polychrome des XVIIe et XVIIIe siècles de saints particulièrement populaires en milieu rural (saint Donat – invoqué contre l’orage, la grêle et… les météores, saint Roch patron des fripiers, des carriers, invoqué contre les épidémies grippe, choléra…, saint Fiacre, patron des jardiniers, des maraîchers… et saint Hubert patron des chasseurs, des gardes forestiers mais également des cabaretiers, des hôteliers et bien d’autres, invoqué contre la rage)
L’intérieur, peint en blanc est sobre et lumineux égayé par les vitraux, ceux du chœur lumineux vous amèneront au recueillement surtout les jours de grand soleil où ils colorent de mille et un reflets les murs adjacents.
Deux portes livraient jadis accès à l‘église. Elles se faisaient face et avaient peut-être chacune leur destination propre. Selon une tradition orale, l’entrée actuelle dite « des seigneurs » était au sud (côté cimetière), celle des « manants » au nord (côté parking). On retrouve trace de cede dernière visible à l’extérieur, aujourd’hui murée et notamment son linteau, triangulaire au sommet, pareil à ceux de beaucoup d’autres bâtisses romanes de la région, ainsi le moulin de l’abbaye de Floreffe, l’église Waha (près de Marche)…
Le linteau de la porte d’entrée actuelle a été travaillé par le sculpteur J.Willame et est connue sous le nom de « la pierre qui chante », c’est tout un symbole.
Au gré de son inspiration et avec son riche talent, il y a exprimé la vie quotidienne, ses joies et ses peines, le travail et la prière de quiconque vient à l’église, à la recherche et la rencontre d’une Présence qui se manifeste dans le monde, à travers et par tant de signes éloquents du Divin.
Les absidioles
Il y avait jadis deux absidioles semi-circulaires situées de part et d’autre du chœur. Celle du sud a été supprimée en 1837 pour permettre la construction de la sacristie. L’absidiole nord a été retrouvée par l’enlèvement d’un autel à retable qui l’obstruait et la jolie petite fenêtre romane est fermée d’un vitrail enjoué et délicat de J.M.Londot. Dans cette absidiole se trouve le sobre baptistère de pierre, que J.Willame a orné de motifs rappelant le linteau de l’entrée. La nef sud s’arrête sur un autel polychromé datant de l’époque baroque dédié à Notre-Dame du Rosaire, patronne de l’église et de la paroisse. Il est probable que l’église ait été dédiée à Notre Dame du Rosaire vers 1707 ; le rosaire, sorte de très grand chapelet que la vierge tient dans sa main droite, faisant l’objet d’un culte particulier dans ces années.
Les orgues baroques de 1763 – classées en 1966 – sont d’une rare qualité, apparaissent comme accrochées au mur du fond (à consulter sur une autre notice). Sous le jubé, sur le mur du fond se déroulent, centrées sur une image de la dernière Cène, les stations d’un Chemin de croix, inscrites dans de solides blocs de pierre bleue par ce même J. Willame, inhabituellement composé de seize stations au lieu de douze ou quatorze (voir autre notice à ce sujet).
La restauration de 1975 a permis à l’église de retrouver son volume initial, une réelle densité, une noblesse qui impressionne, bref, un climat qui invite à la prière. Notre église est également connue pour son acoustique exceptionnelle. Pour en profiter pleinement, Musicawierde de la fabrique d’église organise dans ce cadre merveilleux des concerts de musique classique et de chant choral, au succès grandissant.
Ces quelques notes sont très incomplètes. Elles se sont voulues discrètement disponibles pour aider à se sentir bien accueilli dans l’église ainsi renouvelée, une église que chacun des responsables, au cours de longs mois de recherches puis de restauration, voulait voir un jour ouverte et appelant à la prière, au recueillement.
« CHANTEZ AU SEIGNEUR UN CHANT NOUVEAU… »
Tout le travail des hommes, ceux d’aujourd’hui comme ceux d’hier qui ont construit, gardé, entretenu, restauré cede église ; les beaux moments d’une vie comme les plus difficiles ; la « pierre qui chante », parle, vit ; les instruments qui disent le trop-plein de notre cœur ; la lumière qui fait parler l’architecture ou qui joue dans les vitraux ; nos humbles démarches, notre présence maintenant dans cette église ; nos efforts d’accueil, d’écoute ; nos réunions liturgiques et de prières : tout cela c’est… ce « chant nouveau » Alléluia
G.Guillaume Curé (1970-2002)
Sur le site des ‘Eglises ouvertes’, vous pourrez y lire une description des éléments notés comme ‘remarquables’ de cette église N.-D. du Rosaire :